Premier vignoble certifié en viticulture biologique régénérative au pays, la Bauge assume des choix clairs (hybrides en tête, touches mesurées de vinifera, vinifications sans intrants) pour faire émerger un vin québécois ancré dans le lieu, la fraîcheur et la précision.
Au cœur de Brigham, en Estrie, le Vignoble de la Bauge déploie ses rangs de vignes au milieu d’une campagne qui se colore au gré des saisons
Fondé en 1986 par les parents de Simon Naud, le vignoble s’est d’abord inscrit dans des pratiques de culture et de vinification conventionnelles avant d’évoluer vers une autre approche.
Depuis qu’il a repris la barre en 1996, le vigneron poursuit un objectif clair : produire des vins qui racontent le Québec, sans imitation.

Photo: Courtoisie Vignoble de La Bauge
Du bio au régénératif
En 2024, la Bauge est devenue le premier vignoble canadien à obtenir la certification Regenerative Organic Agriculture (ROA), un sceau reconnu mondialement qui va au-delà du bio.
Pour Simon Naud, il ne s’agit pas seulement d’une méthode agricole, mais d’une façon d’ancrer ses vins dans leur territoire. « Le vin peut être un vecteur d’identité aussi fort que la langue ou la culture. Nos vins doivent dire qui nous sommes et d’où nous venons », résume-t-il.

Après vingt ans de viticulture conventionnelle, il amorce une transition vers le bio en 2016, mais en constate vite les limites (plus de passages de tracteur, sols compactés).
Il se tourne alors vers les pratiques régénératives, qui misent sur la biodiversité et la réduction de l’empreinte carbone.
Aujourd’hui, des moutons broutent sous les rangs, aèrent le sol et remplacent la tondeuse; des hirondelles nichent dans des abris et jouent le rôle d’insecticides naturels.

Photo: Courtoisie Vignoble de La Bauge
Et dans une parcelle expérimentale, groseilliers, sureaux et argousiers poussent aux côtés de la vigne, avec l’objectif de créer un écosystème vivant et résilient, une initiative parmi d’autres déjà en cours au domaine.
Au chai, cette philosophie suit avec des vinifications sans levurage ni filtration, sans sucre ajouté et sans intrants. « On ne veut pas trafiquer le vin. Ce qu’on cherche, c’est un profil qui soit le reflet de nos sols et de notre climat. »
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La réflexion s’inscrit dans l’histoire récente du vignoble québécois. « Dans les années 1990, on nous demandait des vins puissants et boisés. Aujourd’hui, on cherche davantage la fraîcheur et la buvabilité. Pourquoi vouloir ressembler à une autre région ? »
Plutôt que de copier un ailleurs, La Bauge assume un style nordique, précis et vivant.
Au vignoble, on privilégie ainsi des cépages hybrides rustiques adaptés à nos climats et intègre, avec parcimonie, des vinifera (cabernet franc, gewurztraminer, savagnin, etc.) pour la complexité aromatique et des repères gustatifs.
« Respecter où on est, voilà l’essentiel », conclut Naud.
En dégustation

Voltige : Vin délicat et aérien construit autour du frontenac blanc et rehaussé par une touche de vinifera. Nez d’agrumes et de poire. En bouche, on retrouve une fraîcheur éclatante, des notes de poire et de mandarine et un léger grain tannique en finale.
Régénération: Frontenac blanc, La Crescent, soupçon de gewurztraminer. Profil plus expressif et floral, texture ample, équilibre entre vigueur des hybrides et nuances aromatiques des vinifera.

Vidal s’assume : 100 % vidal, pressurage en grappes entières. Vin croquant et énergique, au léger perlant naturel. « J’ai voulu garder cette petite effervescence qui amène du plaisir », mentionne Simon Naud durant la dégustation.
Beau-jus Blues : Cuvée rouge issue du frontenac noir et du marquette, fermentée sur les peaux de gewurztraminer. Un vin fruité, souple, floral, qui garde néanmoins de la tension.
Visiter le vignoble de La Bauge

La Bauge propose des dégustations au comptoir et, selon la saison, des visites guidées du vignoble (souvent sur réservation). Des planches de charcuteries et fromages sont offertes sur place, à déguster sur la terrasse.
Les offres et les horaires varient au fil de l’année. Avant de vous déplacer, consultez leur site web pour connaitre les informations à jour (horaires, tarifs, réservations).
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Marie-Noël Ouimet est rédactrice et créatrice de contenu spécialisée en gastronomie, vin et voyage. Fondatrice du magazine web Urbaine City, elle met en lumière depuis plus de 10 ans les plaisirs de la table et les destinations qui les font rayonner. Elle est également titulaire de la certification WSET 3 en vins et spiritueux.





